Il nous semble juste de penser que c’est notre volonté qui est à la source de nos actions.
Pourtant, nous allons voir que la volonté, n’est pas la cause de nos mouvements, mais un effet traduisant des échanges cérébraux préparant l’action…

Dans les années 1970, les expériences de Benjamin Libet[1] de l’université d’état de Californie à San Francisco, démontrent que tout ce qui se produit est d’abord inconscient, avant de devenir conscient. Pour cela, il demande à des participants de noter à quel moment précis ils appuient sur un bouton. Et ce qu’il observe systématiquement c’est que l’activité du cerveau précède la décision consciente. Des événements cérébraux inconscients observables sous forme de potentiels électriques – appelés potentiels de préparation – précèdent dans un temps variable (de 0,3 à plusieurs secondes), la sensation consciente de décider d’appuyer sur le bouton.
Résultat : le cerveau initie nos mouvements volontaires, avant même l’apparition d’une volonté consciente de faire ces mouvement.
Quel rôle reste-t-il pour la conscience, le libre arbitre ?
Il observe qu’il existe un espace d’environ 200 millisecondes qui permet à la conscience de désamorcer une action du cerveau…
Notre libre arbitre se réduirait à l’acceptation ou le rejet d’actes inconscients…
Nous ne sommes pas libres de vouloir, mais seulement libres de refuser…
Ces expériences ont été reproduite par d’autres chercheurs avec le même résultat.
Qu’est ce qui déclenche la volonté d’agir ?
L’Institut des sciences cognitives du CNRS, à Lyon, a proposé d’identifier le substrat neurologique de l’intention d’agir.
LE CORTEX PARIÉTAL semble être à l’origine ou être nécessaire à une « prise de conscience » du mouvement intentionnel, car les personnes qui ont subi des lésions du cortex pariétal sont incapables de prendre conscience de leur volonté immédiate d’agir. Cela signifie que leurs actions sont initiées à leur insu. Elles ont l’intention consciente d’appuyer sur le bouton mais elles n’ont pas conscience du moment précis où le geste va être exécuté.
Deux intentions à distinguer
L’INTENTION EN ACTION
Les mouvements sont commandés par des influx nerveux préparés dans le cortex moteur.
Le cortex pariétal est le maître du mouvement, il envoie des instructions au cortex moteur, via le cortex prémoteur, pour lui demander de préparer telle ou telle séquence de gestes, qui lui permettront par exemple de bouger le bras droit pour saisir un verre.
Dans le cortex moteur, une activité neuronale est enclenchée, et une salve d’impulsions électriques est émise, laquelle active les muscles suivant une séquence temporelle produisant le mouvement désiré.
Le début de cette activité neuronale correspondrait au potentiel de préparation motrice, dont les expérimentateurs décèlent les prémices 350 millisecondes avant la prise de conscience de son existence.
Le potentiel de préparation motrice et l’activité neuronale s’accentuent, de sorte que le sujet finit par percevoir sa propre intention de bouger le bras.
À ce moment, des échanges du cortex moteur vers le cortex pariétal et en sens inverse (via le cortex prémoteur) aboutiraient à cette perception consciente (quelque 240 millisecondes avant le début du mouvement).
Puis, quand le potentiel de préparation atteint son maximum, le cortex moteur libérerait la commande nerveuse stimulant les muscles.
Chez les patients dont le cortex pariétal est endommagé, l’intention consciente ne surviendrait qu’à ce dernier moment, soit parce qu’ils voient le mouvement se réaliser, soit parce qu’il sentent l’action musculaire de leurs doigts.
Une lésion de cette aire prémotrice supplémentaire est souvent associée au syndrome de la main anarchique (La main du diable). La main du coté opposé à l’hémisphère lésé n’est plus sous le contrôle de la volonté de l’individu, qui la considère comme une entité étrangère dotée de ses propres motivations, inconnues du sujet.
L’INTENTION PRÉALABLE
Qualité fondamentale de l’esprit humain.
Plusieurs observations laissent penser qu’elle prend naissance dans les régions les plus antérieures du cerveau, dans le cortex préfrontal.
Certains individus porteurs de lésions dans ces régions – lésions du cortex cingulaire antérieur et du cortex préfrontal dorsolatéral – sont sujets à ce que le neurologue François Lhermitte a nommé comportement d’utilisation. La perception visuelle d’un objet déclenche de façon automatique, un comportement stéréotypé d’utilisation de l’objet. Si on lui présente un verre d’eau, il le saisit et en boit le contenu, une paire de lunettes, il la pose sur son nez, une deuxième paire, il la dépose par-dessus la première… Si on lui demande pourquoi, il dit qu’il espérait satisfaire les attentes de l’expérimentateur. Quand on lui demande de ne pas agir ainsi, il continue, se justifiant par les mêmes motifs… cela résulte d’une incapacité à former des intentions préalables.
Notre marge créative est l’acceptation ou le rejet de nos pulsions inconscientes contrôlées par une partie du cerveau…
Nous ne sommes donc pas à l’origine de nos pulsions… mais à l’origine de notre contrôle…
Dans ces circonstances il devient essentiel de comprendre ce qui peut influencer notre cerveau…
Quelle est la place du lâcher prise, dont l’on sait qu’il inverse le processus de l’activité cérébrale.
Le lâcher prise agit sur le cerveau
Le Professeur Jacques BESSON (Faculté Biologie & médecine, Université de Lausanne, chef de service de psychiatrie communautaire CHUV) nous explique ce qu’il en est des moments de présence d’un point de vue du cerveau[2] :
“Il existe des imageries cérébrales de transe chamanique et de médium en activité, qui montrent que contrairement aux activités spirituelles qui se marquent par une activité cérébrale – on voit telles et telles régions qui s’activent – dans le médium en activité, c’est le contraire qui se passe, c’est comme-ci le médium éteignait les activités corticales supérieures, comme-ci il laissait aller quelque chose qui est d’un autre ordre, qui n’ai pas intellectuel, qui n’est pas rationnel, et dont nous ne savons pas la nature exacte. Nous pensons que c’est ce lâcher prise sur la cognition qui permet d’avoir une conscience plus large et moins focalisée, peut être une espèce de lâcher prise de très haut niveau qui permet d’entendre ce que l’on entend pas quand on écoute.”
Si le lâcher prise éteint notre activité cérébrale, qu’en est-il des actions créées en pleine présence, sont-elles issues de notre volonté… ?
Sources
Extrait de Cerveau & Psycho – N° 6 (page 79 à 83) dans la rubrique Neurobiologie “Clés comportementales”
La volonté d’agir est-elle libre? Écrit par Gilles LAFARGUE et Angela SIRIGU
la-volonte-dagir-est-elle-libre-gilles-lafargue-et-angela-siriguTélécharger
Angela SIRIGU, directrice de recherche au CNRS, responsable de l’équipe de neuropsychologie à l’Institut de neurosciences cognitives à Lyon.
Gilles LAFARGUE est psychologue, docteur en neurosciences, attaché d’enseignement à l’Université Paris 13
Villetaneuse, membre de l’équipe de neuropsychologie. lafargue@isc.cnrs.fr
[1]Benjamin Libet : https://fr.wikipedia.org/wiki/Benjamin_Libet
[2]https://www.youtube.com/watch?v=RAv0gGlbiPI&ab_channel=TempsPrésent
Vidéo intéressante en liant avec le sujet : “SPINOZA – Le libre-arbitre n’est-il qu’une illusion ?” par Le Précepteur, que vous retrouverez sur la playlist YouTube “Cultivons notre capacité à raisonner”